La villa
Edifiée en 1878
La villa La Sapinière appartient à la première génération des villas (1870-1890) construites de retour du Mexique.
"Retrouver la maison de Barcelonnette, avec ses grandes chambres ensoleillées, la grande et haute salle à manger, protégée du soleil par des volets mi-clos et où, suivant l'usage du temps, les initiales de mon père étaient frappées en or sur le haut dossier des chaises de cuir vert... Revoir dans le parc le coin des belles fraises chaudes et épanouies dans le sable, les lilas encore en fleurs...". Paul Reynaud, Mémoires, Venu de ma montagne, Flammarion, Paris, 1960
La maison de Barcelonnette (1878-1883)
C’est ainsi que Paul Reynaud (1878-1966) décrit la maison de Barcelonnette édifiée en 1878 par son père Alexandre Reynaud. Natif de Saint-Paul-sur-Ubaye, le père de l’homme d’État français choisit Barcelonnette, sous-préfecture, pour édifier, parmi les premiers émigrants ubayens de retour du Mexique fortune faite, une villa de villégiature qu’il baptise La Sapinière.
La construction à peine achevée (1883), Alexandre Reynaud remanie profondément sa "bâtisse" pour prendre modèle sur la villa La Roseraie construite à proximité. “Il a enlevé les mansardes, par conséquent la toiture, relevé les murailles d’un étage et formé son toit sur quatre pentes conformes aux nôtres ; seulement il est moins élévé et au lieu de châssis, il a préféré l’oeil de boeuf”. (lettre de L.F. Tron à ses fils, 1883).
Elle se distingue par sa proximité avec le modèle urbain classique local, hérité du 18e siècle. Les premières villas adoptent toutes un plan simple massé de forme rectangulaire auquel répond une élévation symétrique percée de cinq travées et couverte d’une toiture à quatre pans. Le terme choisi pour évoquer les premières villas est celui de « bâtisse ».
Il sera remplacé par celui de « villa-château » pour évoquer la seconde génération des villas (1890-1914).
Une opération de rhabillage méconnue (1895-1900)
En 1892, Alexandre Reynaud vend sa bâtisse à un compatriote pour financer au Mexique la construction d’une filature, - la fabrique de Santa Rosa (Vallée d’Orizaba, État de Veracruz). Le nouveau propriétaire de La Sapinière fait appel à l’architecte grenoblois Francis Girard. Le « rhabillage » (mise au goût du jour) porte essentiellement sur l’enveloppe. Les façades nord et sud reçoivent un décor architectonique qui sort la villa de son anonymat : alternance de frontons rectangulaires et semi-circulaires (premier étage), encadrements (rez-de-chaussée et second étage), corniches ouvragées à modillons et tables (second étage).
La façade sud est agrémentée d’une véranda métallique ouvrant directement sur le parc par un escalier en fer à cheval exécuté dans la pierre de taille grise de la Chapelue, extraite dans le Queyras voisin. À l’intérieur, la création d’un cabinet de bains revêtu d’un décor de faïence réalisé par les faïenceries de Sarreguemines, associe des gerbes d’iris et une frise de glycines, selon une composition familière du décor thermal contemporain.
La première œuvre du musée
Avec ses éléments de décor, - ses boiseries ouvragées en noyer, ses parquets en marqueterie, ses faïences et vitraux Art Nouveau, la villa La Sapinière constitue la toute première œuvre du musée. En 1992, la petite fille d’Alexandre Reynaud, Colette Dernis, fait don du mobilier du salon-fumoir de La Sapinière (le bureau et la bibliothèque en ébène, la garniture de cheminée et une paire de fauteuils). En 2004, Bernard Martel offre un ensemble de vitraux Art Nouveau (décor floral composé de pavots) qui, après restauration par Claude Moine, ont pris place dans la baie du grand escalier.
La villa La Sapinière est la seule villa "mexicaine" ouverte à la visite. Implantée dans le quartier Est des villas (la plus forte concentration de villas), la Sapinière fait partie d’un parcours pédestre qui accompagne les visiteurs dans la découverte du patrimoine monumental des villas et de la ville (ancienne bastide médiévale) grâce à des plaques informatives dont les textes ont été réunis par le musée.